L’interaction dans un cours en ligne : un défi
Publié le 13 avril 2020 par Maryliz Racine
Bien que la formation à distance (FAD) se popularise depuis un certain nombre d’années dans les universités, un des principaux écueils de ce type de formation demeure l’abandon des étudiants en cours de semestre. Pour remédier à cela, deux des pistes de solutions explorées par la littérature scientifique sont la promotion des échanges entre les apprenants et le travail collaboratif. Cet article présente les résultats d’une synthèse de connaissances effectuée par une équipe de chercheurs de l’Université TÉLUQ ayant pour objectif d’identifier les principaux types de dispositifs mis en œuvre dans les établissements d’enseignement supérieur canadiens qui offrent de la FAD.
Source de l’image : ShutterStock
L’importance des interactions
Cathia Papi et Caroline Brassard, de l’Université TÉLUQ, ainsi que leur équipe de recherche, ont souligné que les théories de Piaget et de l’école de Genève sur cette question des dispositifs d’interaction et d’accompagnement en formation, ainsi que celles de Vygotsky et de la psychologie américaine, appuient cette analyse de l’influence favorable de ces dispositifs sur la persévérance des étudiants. Depuis les années 1990, les études sur la FAD et sur les effets des interactions entre les apprenants se sont en outre multipliées.
Néanmoins, les technologies de communication ont bien évolué et de nouvelles questions se posent. Downes et Siemens, qui privilégient une « approche connectiviste » (Siemens [2005], Kop et Hill [2008] et Downes [2012] cités dans Papi et al., 2017, p. 4), se sont interrogés sur l’évolution de nos façons de communiquer et d’apprendre avec l’apparition et la généralisation de l’utilisation des réseaux sociaux. Papi, Brassard et leur équipe ont ainsi analysé toutes les recherches portant sur la FAD au Canada, entre 1995 et 2014, pour identifier les principaux dispositifs d’interaction et d’accompagnement pour les étudiants et leur usage.
Peu de motivation chez les étudiants
La synthèse de connaissances effectuée par l’équipe de l’Université TÉLUQ souligne notamment qu’un des défis à la mise en place de dispositifs de collaboration entre pairs a pour origine des attitudes et comportements des étudiants, c’est-à-dire qu’il relève notamment de leurs goûts et de leurs habitudes d’apprentissage.
« Bien que de nombreux étudiants semblent être ouverts au principe de la collaboration entre pairs, la plupart des répondants ne sont pas intéressés par la création de liens sociaux dans le cours et préfèrent travailler indépendamment. » (Papi et al., 2017, p. 11)
Les études sur le sujet font ainsi ressortir que la collaboration entre les apprenants nécessite des efforts et suppose des contraintes. Comme le mentionnent Papi et Brassard, « elle implique la volonté de participer à un objectif commun, une certaine disponibilité et un engagement régulier » (Papi et al., 2017, p. 11).
Tous les dispositifs ne produisent pas les mêmes effets
Une variété de dispositifs peut être mise en place en FAD, mais tous semblent imparfaits. En voici trois exemples :
- Segments (cours ou communications) synchrones
Il s’agit d’un bon moyen d’établir la communication avec les étudiants, qui semblent toutefois éprouver des difficultés à rester attentifs tout au long de ces segments (Giroux, 2009, cité par Papi et al., 2017, p. 10).
- Forums (dans un contexte d’évaluation)
Les forums semblent permettre les interactions entre les apprenants, mais les débats sont parfois difficiles à amorcer (Park et al., 2011, cité par Papi et al., 2017, p. 10). On rapporte même que les étudiants auraient tendance à éviter de critiquer les réflexions des autres et s’autocensureraient lorsque la participation à un forum se fait dans un contexte d’évaluation (Dymoke et Hughes, 2009, cité par Papi et al., 2017, p. 10).
- Forums anonymes
Ces forums, où l’anonymat des participants est possible, ont l’avantage de susciter une participation sans autocensure des étudiants, mais l’évaluation des apprentissages par l’enseignant devient complexe (Bowen et al., 2012, cité par Papi et al., 2017, p. 10).
Conclusion
Aucun des dispositifs mis en place dans un contexte de FAD ne semble donc être sans faille, mais Papi, Brassard et leur équipe ont réussi à dégager un consensus des études réalisées sur la FAD : « les interactions avec les pairs ainsi qu’avec les enseignants ou tuteurs procurent un soutien sur différents plans de soutien à l’apprentissage » (Papi et al., 2017, p. 11). Et les étudiants, lorsqu’ils jouent le jeu du travail collaboratif, développent un sentiment d’appartenance à une communauté au fil des interactions.
Référence
Papi, C., Brassard, C., Bédard, J.-L., Medoza, G. A. et Sarpentier, C. (2017). L’interaction en formation à distance : entre théories et pratiques. TransFormations (revue éditée par l’Université de Lille 1), (17), 1-25. https://r-libre.teluq.ca/1866/1/219-885-1-PB.pdf
http://rire.ctreq.qc.ca/2020/04/interaction-cours-en-ligne/
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L’interaction dans un cours en ligne : un défi
Publié le 13 avril 2020 par Maryliz Racine
Bien que la formation à distance (FAD) se popularise depuis un certain nombre d’années dans les universités, un des principaux écueils de ce type de formation demeure l’abandon des étudiants en cours de semestre. Pour remédier à cela, deux des pistes de solutions explorées par la littérature scientifique sont la promotion des échanges entre les apprenants et le travail collaboratif. Cet article présente les résultats d’une synthèse de connaissances effectuée par une équipe de chercheurs de l’Université TÉLUQ ayant pour objectif d’identifier les principaux types de dispositifs mis en œuvre dans les établissements d’enseignement supérieur canadiens qui offrent de la FAD.
Source de l’image : ShutterStock
L’importance des interactions
Cathia Papi et Caroline Brassard, de l’Université TÉLUQ, ainsi que leur équipe de recherche, ont souligné que les théories de Piaget et de l’école de Genève sur cette question des dispositifs d’interaction et d’accompagnement en formation, ainsi que celles de Vygotsky et de la psychologie américaine, appuient cette analyse de l’influence favorable de ces dispositifs sur la persévérance des étudiants. Depuis les années 1990, les études sur la FAD et sur les effets des interactions entre les apprenants se sont en outre multipliées.
Néanmoins, les technologies de communication ont bien évolué et de nouvelles questions se posent. Downes et Siemens, qui privilégient une « approche connectiviste » (Siemens [2005], Kop et Hill [2008] et Downes [2012] cités dans Papi et al., 2017, p. 4), se sont interrogés sur l’évolution de nos façons de communiquer et d’apprendre avec l’apparition et la généralisation de l’utilisation des réseaux sociaux. Papi, Brassard et leur équipe ont ainsi analysé toutes les recherches portant sur la FAD au Canada, entre 1995 et 2014, pour identifier les principaux dispositifs d’interaction et d’accompagnement pour les étudiants et leur usage.
Peu de motivation chez les étudiants
La synthèse de connaissances effectuée par l’équipe de l’Université TÉLUQ souligne notamment qu’un des défis à la mise en place de dispositifs de collaboration entre pairs a pour origine des attitudes et comportements des étudiants, c’est-à-dire qu’il relève notamment de leurs goûts et de leurs habitudes d’apprentissage.
« Bien que de nombreux étudiants semblent être ouverts au principe de la collaboration entre pairs, la plupart des répondants ne sont pas intéressés par la création de liens sociaux dans le cours et préfèrent travailler indépendamment. » (Papi et al., 2017, p. 11)
Les études sur le sujet font ainsi ressortir que la collaboration entre les apprenants nécessite des efforts et suppose des contraintes. Comme le mentionnent Papi et Brassard, « elle implique la volonté de participer à un objectif commun, une certaine disponibilité et un engagement régulier » (Papi et al., 2017, p. 11).
Tous les dispositifs ne produisent pas les mêmes effets
Une variété de dispositifs peut être mise en place en FAD, mais tous semblent imparfaits. En voici trois exemples :
- Segments (cours ou communications) synchrones
Il s’agit d’un bon moyen d’établir la communication avec les étudiants, qui semblent toutefois éprouver des difficultés à rester attentifs tout au long de ces segments (Giroux, 2009, cité par Papi et al., 2017, p. 10).
- Forums (dans un contexte d’évaluation)
Les forums semblent permettre les interactions entre les apprenants, mais les débats sont parfois difficiles à amorcer (Park et al., 2011, cité par Papi et al., 2017, p. 10). On rapporte même que les étudiants auraient tendance à éviter de critiquer les réflexions des autres et s’autocensureraient lorsque la participation à un forum se fait dans un contexte d’évaluation (Dymoke et Hughes, 2009, cité par Papi et al., 2017, p. 10).
- Forums anonymes
Ces forums, où l’anonymat des participants est possible, ont l’avantage de susciter une participation sans autocensure des étudiants, mais l’évaluation des apprentissages par l’enseignant devient complexe (Bowen et al., 2012, cité par Papi et al., 2017, p. 10).
Conclusion
Aucun des dispositifs mis en place dans un contexte de FAD ne semble donc être sans faille, mais Papi, Brassard et leur équipe ont réussi à dégager un consensus des études réalisées sur la FAD : « les interactions avec les pairs ainsi qu’avec les enseignants ou tuteurs procurent un soutien sur différents plans de soutien à l’apprentissage » (Papi et al., 2017, p. 11). Et les étudiants, lorsqu’ils jouent le jeu du travail collaboratif, développent un sentiment d’appartenance à une communauté au fil des interactions.
Référence
Papi, C., Brassard, C., Bédard, J.-L., Medoza, G. A. et Sarpentier, C. (2017). L’interaction en formation à distance : entre théories et pratiques. TransFormations (revue éditée par l’Université de Lille 1), (17), 1-25. https://r-libre.teluq.ca/1866/1/219-885-1-PB.pdf
http://rire.ctreq.qc.ca/2020/04/interaction-cours-en-ligne/
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